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Femmes pionnières: Hatchepsout, la première reine d'Égypte

Pharaon naila maiorana

Parée à la manière d’un homme, Hatchepsout va habilement légitimer sa prise de pouvoir en faisant valoir son ascendance divine. Elle revisite le récit de sa vie, se proclamant fille naturelle du Dieu Amon.

© Naila Maiorana

Elle intrigue. Pensez donc, une femme pharaon, c’est assez rare dans l’Égypte ancienne. Une femme qui a régné durant vingt-deux ans et dont les monuments, érigés à sa gloire, ont été minutieusement martelés après sa mort pour en effacer son effigie. Une femme à poigne, qui reste parée de mystère. Est-ce vraiment la dépouille de l’étonnante Hatchepsout que l’archéologue britannique Howard Carter a découverte, en 1903, dans une tombe de la vallée des Rois, à même le sol, le bras gauche replié sur la poitrine à la manière des souverains?

Ce corps momifié, présenté au monde en grande pompe par le Musée du Caire, en 2007, après avoir été «identifié» grâce à une correspondance entre sa mâchoire et un morceau de molaire qui gisait dans un coffret gravé du nom de la reine, est-il bien le sien? Le secrétaire général du Conseil suprême des antiquités égyptiennes, le Dr Zahi Hawass, habitué des coups médiatiques, a eu beau comparer ce dénouement à la découverte de la tombe de Toutankhamon, son assurance a fait tousser plus d’un égyptologue.

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«Le visage des nobles dames»

Ce qui est sûr c’est que cette souveraine, qui régna au XVe siècle avant notre ère, a eu un destin exceptionnel. Elle fut l’une des très rares femmes pharaons. Probablement une des premières, en tout cas celle dont l’histoire a retenu le nom. Un nom qui ressemble à une promesse. A la vue de la bouille du bébé, sa mère, la reine Ahmes, se serait écriée: «Hat Shepesout», «elle a le visage des nobles dames». Cas à part dans l’histoire des souverains de l’Égypte ancienne en raison de son sexe, elle détonne aussi par la longévité et la stabilité de son règne, deux décennies de prospérité durant la XVIIIe dynastie du nouvel Empire.

À cette époque, on se marie entre membres de la famille royale. Hatchepsout épouse son demi-frère, Thoutmôsis II et, à ses côtés, devient reine. Mais Thoutmôsis II meurt trois ans après avoir accédé au trône suprême. L’héritier désigné s’appelle Thoutmôsis III. Fils du pharaon et d’une de ses épouses secondaires, il n’est pas plus haut que trois pommes. Hatchepsout devient alors régente. Puis réussit, sept ans plus tard, à se faire couronner pharaon. Un coup d’État? Pas selon l’égyptologue Florence Maruejol, qui y voit plutôt une manière de solidifier cette XVIIIe dynastie, relativement jeune.

«Il y avait peut-être une fragilité à maintenir ainsi le pouvoir entre un enfant et une femme, estime-t-elle. Le fait qu’elle soit couronnée pharaon mettait un terme à d’éventuelles velléités d’insoumission.»

Ascendance divine

Hatchepsout s’assied donc sur un trône déjà occupé, mais c’est bien elle qui tient les rênes du pouvoir durant plus de vingt ans, apparaissant, lors des cérémonies officielles, avec les attributs de son rang, la coiffe, mais aussi la barbe postiche. Parée à la manière d’un homme, Hatchepsout va habilement légitimer sa prise de pouvoir en faisant valoir son ascendance divine. Elle revisite le récit de sa vie, se proclamant fille naturelle du Dieu Amon.

Mais cette femme étonnante assure surtout à son royaume une longue période de stabilité, comme le rappelle Florence Maruejol:

«Elle a maintenu l’intégrité des conquêtes réalisées par son père, en Nubie notamment.» On lui doit aussi de splendides monuments, comme le temple de Deir el Bahari, qui se fond littéralement dans la falaise au pied de laquelle il a été construit. Sans compter les expéditions maritimes dont elle fut l’instigatrice, comme celle au pays de Pount, dans la région de la Corne de l’Afrique, et d’où les Égyptiens ramenèrent de l’or, de l’ébène et d’autres merveilles.

Bien qu’enterrée dans la vallée des Rois, à sa mort, en 1457 av. J.-C., Hatchepsout disparaît une deuxième fois sous les coups de marteau. Nombre de monuments à sa mémoire ont été vandalisés, son effigie un peu partout martelée, sur ordre, semble-t-il de Thoutmôsis III. Une vengeance? Ou peut-être la volonté d’effacer une anomalie historique, pas forcément celle d’une femme devenue pharaon, mais l’histoire de ces deux pharaons qui ont incarné en même temps une fonction pourtant indivisible.

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Ankhnespepy II, la toute première régente?

Près de mille ans avant Hatchepsout, une autre femme semble avoir imposé son pouvoir sur l’Egypte antique. Ankhnespepy II, épouse de deux pharaons de la VIe dynastie, Pépi 1er puis Mérenré, aurait gouverné seule, alors que son fils, l’héritier du trône, était enfant. C’est ce que suggèrent des découvertes que l’on doit à l’équipe de Philippe Collombert, professeur au Département de sciences de l’Antiquité de l’Université de Genève.

L’automne dernier, lors de fouilles dans la chambre funéraire d’Ankhnespepy II, à Saqqâra, elle a mis au jour les fragments de deux obélisques, dont un devait mesurer près de 5 mètres, soit largement plus que les obélisques des autres épouses de Pépi 1er. Une preuve, selon les chercheurs, de l’importance de cette reine et de son rôle politique. D’autres éléments retrouvés dans la chambre funéraire, parmi lesquels des formules liturgiques habituellement réservées aux pharaons, semblent conforter cette thèse.

«Femmes pionnières»: cette série d'été présente chaque semaine une femme qui a marqué l'Histoire. Après la première reine d’Égypte, nous ferons le 15 juillet le portrait de Jeanne de Belleville, la «tigresse bretonne».

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