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Sérial killeuse: Enriqueta, la vampire de Barcelone

Sérial killeuse: Enriqueta, la vampire de Barcelone

Les malheureuses victimes d'Enriqueta? Des orphelins des deux sexes âgés de 5 à 16 ans.

© Naila Maiorana

Avec ses yeux sombres et intenses, ses longs cheveux noirs et sa bouche bien dessinée, elle était plutôt jolie, Enriqueta Marti. Pourtant, si la monstruosité avait un visage, ce serait sans doute le sien. Cent ans après sa mort, cette abominable sorcière hante toujours les rues de Barcelone pour avoir – tenez-vous bien! – enlevé, prostitué, assassiné puis dépecé un nombre indéterminé d’enfants dans le but de concocter des potions et des onguents avec leurs restes!

A en croire les minutes des interrogatoires menés après son arrestation et les innombrables articles alors consacrés à Enriqueta, tout commence lorsque, encore toute jeune, elle emménage dans la capitale catalane pour y gagner sa vie. D’abord servante et nourrice, la demoiselle, née en 1868 dans un milieu modeste, comprend vite que son minois plaît et que vendre ses charmes peut lui rapporter gros. Ni une ni deux, elle commence à arpenter les hauts lieux de la prostitution barcelonaise et travaille dans les maisons closes du quartier populaire du Raval. Ses talents multiples y font merveille.

Proxénétisme et sorcellerie

En 1895, âgée de 27 ans, elle épouse un peintre un rien paumé, Joan Pujaló. Leur union est orageuse, ils ne cessent de se quitter et de se réconcilier. Si l’artiste peut s’accommoder du caractère qu’il dit «faux, incertain, étrange et imprévisible» de son épouse, il refuse en revanche d’accepter sa manière de vivre. Il faut dire que Madame a mis sur pied une façon bien à elle de gagner de l’argent. La journée, elle se grime en pauvresse et mendie, attirant la pitié des badauds en faisant passer pour siens des gamins errants qu’elle tient par la main. Le soir, apprêtée, elle fréquente les théâtres et les lupanars des beaux quartiers. Rapidement acceptée dans les hautes sphères de la ville, elle devient LA pourvoyeuse d’enfants pour les pédophiles qui sévissent dans ces milieux fortunés. Ses malheureuses victimes? Des orphelins des deux sexes âgés de 5 à 16 ans. Sa méthode? Elle repère ses proies dans les bas-fonds de la ville, les enlève, les abrite dans l’un des différents appartements qu’elle loue à l’insu de son mari et, leur faisant miroiter une vie meilleure, les met dans les griffes de prédateurs sans scrupule.


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Ce n’est pas tout. Comme si ce commerce sordide ne lui suffisait pas, la diabolique Enriqueta se met à tuer et dépecer des minots. Par peur qu’ils la dénoncent, parlent de ses méthodes atroces et des horreurs qu’elle et ses clients leur font subir? Par pure folie? Personne ne le saura jamais.

Une chose est claire cependant: elle a trouvé un moyen quasi infaillible de se débarrasser des petits corps. En effet, se prenant pour une vraie sorcière, elle utilise le sang, la graisse, les os réduits en poudre, les poils et les cheveux hachés menus de ses victimes pour confectionner un remède antituberculose (!) qu’elle vend à prix d’or aux gens riches de Barcelone – lesquels redoutent justement plus que tout d’être atteints de cette maladie.

Le début de la fin

C’est ainsi que les années passent, doucement, tranquillement, sans que rien ne gêne ni n’inquiète l’immonde Enriqueta, pas même le départ définitif de Joan qui, en 1905, décide que leur mariage doit désormais se conjuguer au passé.

Mais voici qu’un beau jour de février 1912, l’affreuse maquerelle commet – enfin! – l’erreur qui va la perdre. Trop sûre d’elle, elle kidnappe une fillette sur un coup de tête, sans l’avoir préalablement repérée et surveillée. Or, à peine a-t-elle disparu que les parents de la petite Teresita Guitart Congost donnent l’alerte, sillonnent eux-mêmes les rues la ville, créent un ramdam d’enfer, bref font en sorte que pas un seul Barcelonais ne puisse ignorer que leur fille de 5 ans est recherchée.

La méthode est efficace: moins de deux semaines plus tard, une voisine d’Enriqueta entrevoit la frimousse de Teresita qui regarde tristement par une fenêtre et prévient la police qui, après deux semaines d’embrouillaminis et de cafouillages, finit par intervenir. Elle trouve non seulement Teresita mais aussi une autre gamine détenue par Enriqueta: Angelita. La Marti tente bien d’expliquer qu’il s’agit de sa propre fille mais ne convainc personne. Si bien qu’elle est arrêtée séance tenante pour enlèvement d’enfants. Dans les jours qui suivent, les deux jeunes victimes sont évidemment interrogées et, sur la base de la déposition d’Angelita, qui raconte avoir vu Enriqueta poignarder puis couper en morceaux un petit garçon du nom de Pablito, des perquisitions sont effectuées.

Ce que les enquêteurs découvrent fait froid dans le dos: en plus de longues listes – codées – de clients et des parchemins bizarres sur lesquels sont notées de drôles de formules, les policiers mettent au jour les ossements d’au moins une douzaine d’enfants, un couteau à désosser, un sac de vêtements ensanglantés et, pire encore, une cinquantaine de flacons, bocaux et bassines contenant des morceaux de chair ou de graisse qu’elle s’apprêtait à transformer en potions.

Sans regrets

Quand l’affaire éclate, la presse et les Barcelonais se déchaînent. Si rien ne filtre du volet proxénétisme et pédophilie, suite à l’intervention d’amis haut placés de la Marti, les détails sanglants et morbides de cette affaire sont relatés par le menu dans la presse. Les lecteurs, se délectent de cet horrible fait-divers, tout en réclament la condamnation à mort de celle que l’on surnomme désormais la vampire du Raval, jugée dans la foulée responsable de toutes les disparitions inexpliquées de Barcelone. A ce propos, et sans aller jusque-là, il y a en effet fort à parier qu’en vingt ans de folie destructrice, ce monstre a probablement commis plus de meurtres que les douze qui lui sont attribués.

Quoi qu’il en soit, un jour de 1913, alors que l’opinion publique s’est un peu calmée, Enriqueta, qui a avoué ses crimes sans manifester l’ombre d’un regret, est retrouvée sans vie dans sa cellule. Officiellement, elle a succombé à un cancer de l’utérus. Officieusement, elle a été battue à mort par les autres détenues.

Carte d’identité

Nom: Enriqueta Marti i Ripollés
Née en: 1868 à Sant Feliu de Llobregat (Espagne)
Nombre de meurtres: Au moins 12
Mode opératoire: Comme elle dépeçait ses victimes, il n’a pas été possible de déterminer sa méthode avec certitude. Mais elle tuait probablement au couteau.
Sentence: Aucune. Elle est morte en détention préventive avant d’avoir été jugée

Bien introduite dans la haute société de Barcelone, à qui elle fournissait notamment des potions antituberculose fabriquées à base de restes d’enfants, Enriqueta Marti louait plusieurs appartements dans le quartier populaire du Raval.

Teresita Guitart Congost, 5 ans, a été enlevée en février 1912. Elle a pu être libérée grâce à l’intervention d’une voisine d’Enriqueta, qui l’avait entrevue par une fenêtre.

Enriqueta Marti écumait les ruelles de la capitale catalane à la recherche d’orphelins des deux sexes, âgés de 5 à 16 ans, qu’elle prostituait puis tuait, probablement à coups de couteau.

«La vampire de Barcelone» a inspiré des films, dont «La Ropavejera», de Nacho Ruipérez, sorti en 2014. De même, de nombreux écrivains se sont penchés sur cette histoire, comme Marc Pastor, auteur de «La mauvaise femme» (Actes Sud, 2012). A noter que des historiens parlent désormais d’exagération et de complot. Enriqueta serait une victime expiatoire, une machine à faire vendre des journaux. Cette thèse semble toutefois oublier que les enquêteurs ont tout de même trouvé des preuves accablantes.

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